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IRAKERE
Mal à l'aise dans la « ORQUESTA CUBANA de MÚSICA MODERNA » qui n'assume plus son rôle de formation phare de la musique cubaine mais se contente le plus souvent d'accompagner quelques chanteurs solistes, le pianiste Chucho VALDÉS et quelques-uns parmi les membres de la formation ont d'autres préoccupations musicales. Chucho et le percussionniste Oscar VALDÉS Jr. ont de longues discussions sur les racines africaines des musiques cubaines, sur les instruments, les percussions utilisées dans la musique des descendants des yoruba, congo, arará … domaine que connaît bien Oscar et aussi sur le jazz dont "Chucho" a une très grande connaissance. Dans le cadre de la «OCMM » tous deux font partie d'un quinteto qui en 1970 se rend au Jamboree Festival de Varsovie. Ils y font connaître une œuvre de "Chucho" VALDÉS, résultat de ces discussions et recherches : «Misa Negra ». Les jazzmen présents et notamment Dave Brubeck sont impressionnés. Celui-ci les motive. Le trio de"Chucho" avec Oscar et le contrebassiste Carlos del PUERTO interprète aussi les nouvelles idées en gestation. |
Le quinteto de "Chucho" Valdés. |
Au cours de l'année 1972 "Chucho" VALDÉS franchit le pas et rassemble les plus jeunes et les plus enthousiastes des musiciens de la «OCMM » pour former un groupe. Ils s'isolent pour travailler et baptisent la formation d'un nom yoruba : « IRAKERE ». C'est à Santiago de Cuba qu'ils font leur première apparition, au début de 1973, en toute discrétion, sur les ondes de CMKC et au club San Pedro del Mar. Outre "Chucho" , les premiers musiciens intégrant « IRAKERE » sont Paquito d'RIVERA , saxophone alto ; Jorge VARONA , trompette ; Carlos Emilio MORALES, guitare ; Carlos del PUERTO, basse électrique ; Bernardo GARCÍA , batterie ; « El Tato » ALFONSO et Oscar VALDÉS, percussions .
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Au fil des concerts, comme par exemple au Salon Mambí du Tropicana, dans la partie accessible aux cubains, et au moyen de ces thèmes dansants que la formation a à son programme, « IRAKERE » parvient à faire entrer le public dans son jeu et à lui faire entendre et apprécier ses recherches musicales sur l'étude et l'emploi des rythmes ancestraux. La reprise fréquente du traditionnel 6/8 donne une originalité certaine au Jazz irakerien. Au cours des mois qui vont suivre "Chucho" VALDÉS incorpore de nouveaux noms à son groupe, le batteur Enrique PLÁ ; le trompettiste Arturo SANDOVAL qui va former avec VARONA un duo de trompette historique et inégalé dans l'histoire de la musique cubaine qui prend la succession de la célèbre paire Calixto LEICEA et Pedro KNIGHT les trompettistes historiques de la "SONORA MATANCERA". |
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En 1976 le groupe est en Pologne pour le Jamboree, en Finlande -où nait sous le saxophone de d'RIVERA le thème "Chekeré Son"-; en Italie; en Allemagne et en Europe de l'Est. Le concert donné au Teatro de la CTC en 1977 offre un répertoire éclectique qui séduit le guitariste Leo BROUWER qui prend rendez-vous pour un travail commun.
Finlande 1976. Paquito et Chucho Valdés. |
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Cette année, un événement marque la vie du groupe. Dans le cadre d'un projet officiel, des musiciens américains se rendent à La Havane. Il y a parmi eux, Dizzy Gillespie, Stan Getz, Thad Jones, Ray Mantilla, David Amram … Oscar VALDÉS reçoit chez lui à Marianao Dizzy Gillespie qui a réclamé une descarga dès son arrivée et que SANDOVAL est allé chercher au bateau. Oscar rassemble musiciens, instruments, cervezas … pour satisfaire Dizzy . AVEROFF se loue une chambre dans l'Hôtel où sont logés les américains pour mieux les côtoyer. A l'Hôtel Havana Libre se tient une répétition de « IRAKERE ». Les musiciens américains s'y présentent et avec plusieurs membres de « IRAKERE » improvisent une jam's. AVEROFF prête son saxophone à Stan Getz qui le conserve toute la soirée. Dizzy, Earl Hines … y participent. |
La formation cubaine est de nouveau dans les studios en 1978. Ils sont désormais onze musiciens. « El Niño » ALFONSO a remplacé son frère aux percussions et Armando CUERVO est embauché pour des parties vocales et les percussions. |
«IRAKERE » est invité en Jamaïque, au Canada puis au Carnegie Hall pour le Festival de Newport. C'est pour le grand public une découverte. « IRAKERE » joue à Washington et dans plusieurs villes des Etats Unis avant de se rendre au Festival de Jazz de Montreux. Le groupe remporte un Grammy historique avec le disque enregistré à Newport et Montreux |
Festival de Newport 1978. |
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Peu avant, à Cuba, « IRAKERE » se produit au Teatro Karl Marx avec le guitariste Leo BROUWER. Encore une fois le succès est tel que les trois jours de concert ne suffisent pas et qu'il faut la semaine suivante répéter les trois soirées qui seront enregistrées et constitueront le disque « Irakere. Leo Brouwer » . |
Jaquettes de L.P. de Irakere 1978
Au début de l'année 1979, les musiciens américains sont de nouveau dans l'île. Lors d'un concert au Teatro Karl Marx « IRAKERE » interprète plusieurs thèmes dont certains verront le jour à travers deux disques retraçant l'événement. .... |
Puis «IRAKERE » réalise une grande tournée à travers les Etats Unis et enregistre pour la Columbia. « IRAKERE 2 », nominé l'année suivante pour les Grammies; se présente au Festival International de Jazz de Mexico et en Amérique Latine. |
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La musique de « IRAKERE » est bien issue d'un creuset où se sont fondues, de manière consciente et inconsciente, toutes les racines cubaines et afro-cubaines à laquelle VALDÉS et tous ceux qui ont participé aux premières recherches musicales ont incorporé les plus importantes conquêtes musicales de la musique internationale, en particulier celle issues de la musique européenne et du Jazz. En outre « IRAKERE » a su tirer des instruments, trompettes et saxophones toutes les richesses sonores qu'ils sont capables de produire, rejoignant le travail accompli plus de trente ans auparavant par Mario BAUZÁ . |
La formation durant la tournée aux Etats Unis en 1979.
Armando Cuervo en bas à droite à rejoint Irakere.
Le groupe participe au premier Festival Jazz Plaza organisé en 1979 par Bobby CARCASSÉS. La fin de la décennie est marquée par le départ de Paquito d'RIVERA puis par celui de Arturo SANDOVAL qui forme son propre groupe. |
De nouveaux musiciens entrent dans « IRAKERE » : Germán VELAZCO, saxophone alto et soprano puis José Luis CORTÉS, flûte; José Miguel "El Greco" et enfin Juan MUNGUÍA, trompette. « IRAKERE » devient un véritable centre de formation à travers lesquels vont passer des instrumentistes qui deviendront presque tous des chefs de file de la musique cubaine, traditionnelle ou de jazz… Oscar Valdés, Carlos del Puerto, Jorge Mungía, Enrique Plá, "El Niño" Alfonso, José Luis Cortés, Germán Velazco, Carlos Averoff, Chucho et Carlos Emilio. Le groupe de tel qu'il se présente après les départs de Paquito et de Arturo.
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Au cours de l'année 1980, après avoir enregistré à La Havane, «IRAKERE » se rend au Japon dans le cadre d'une coopération intergouvernementale et se présente au public nippon. Il y reste un mois au cours duquel plusieurs enregistrements voient le jour; « Encuentro » rassemblant les thèmes du japonais Chikara Ueda ; « Cuba Libre » et « El Coco » rassemblant les prises live effectuées durant le séjour. El Coco. 1980. La Suède, le Danemark, l'Allemagne accueillent le groupe la même année. « IRAKERE » part en tournée au Mexique, tournée au cours de laquelle les musiciens se livrent à des descargas quotidiennes dans les clubs aztèques. |
Au Venezuela en 1981 la formation joue à Maracaïbo et au Poliedro de Caracas. Miguelito CUNÍ chante avec l'orchestre. |
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« IRAKERE » se déplace en France en 1983. Le public est conquis et le disque « Calzada del cero » enregistré peu avant à Cuba est aussi édité en France sous le titre « Le Chemin de la Colline ». Diversifiant ses enregistrements pour le public "Chucho" VALDÉS et son groupe offrent deux plages d'exception « Tema de Chaka » et « Homenaje a Charles Mingus ». La formation participe au Festival International de Varadero et au IV° Festival Jazz Plaza de La Havane. Un Festival auquel « IRAKERE » participera désormais régulièrement. L'année 1985 est quant à elle riche en enregistrements et d'excellents thèmes voient le jour : « Estela va a estalla », « A Chano Pozo », « Tierra en trance », « Ruta 43 », « Quince minutos »… |
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Disques de 1985.
"Chucho" recrute de jeunes musiciens et travaille d'arrache pied pour intégrer en un ensemble homogène nouveaux et anciens. La nouvelle mouture de « IRAKERE » inclue Orlando VALLE, flûtiste, mais qui va devenir aussi le maître des claviers ; César LÓPEZ , saxophoniste et flûtiste ; Javier ZALBA saxophoniste ; Manuel MACHADO, trompette ; Carlos ALVARÉZ , trombone et voix. Seul VARONA assure pour les cuivres la continuité de « IRAKERE ». "Chucho" appelle également Miguel « Angá » DIÁZ pour remplacer « El Niño ». Au début de 1988, c'est en République Dominicaine que la nouvelle géométrie de la formation subit le baptême du feu. Le jeune Orlando « Maraca » VALLE offre un thème au répertoire « Las tres carabelas ». C'est aussi le moment choisi par "Chucho" pour faire évoluer la formation sur le plan des harmonies, des sonorités avec l'utilisation systématique des synthétiseurs et claviers électroniques les plus sophistiqués : Yamaha RX5 et DX 7 2. L'Europe succède à la République Dominicaine et « IRAKERE » parcourt l'Espagne, la Norvège, la France pour le Festival des Caraïbes, joue au New Morning, part en Italie et retourne au Ronnie Scott à Londres. |
Orlando Valle le nouveau flûtiste de Irakere. |
Les nouveaux thèmes fétiches deviennent « Changó », « Xiomara », « El Guayo de Catalina »… Ils sont enregistrés. Au retour d'Europe Jorge VARONA disparaît. « IRAKERE » se présente au X° Festival Jazz Plaza 1989 qui rend hommage à VARONA , permet au groupe de briller dans sa nouvelle composition avec la trompette de Juan MUNGUÍA. Le groupe s'y produit avec l'Orchestre Symphonique de Cuba pour un « Homenaje a Charlie Mingus » et pour le « Concierto de Aranjuez ». Quatre de ses membres accompagnent également une prestation de Max Roach . Enrique Plá et Max Roach. Jazz Plaza 1995. |
A Cuba la situation devient difficile. L'Union Soviétique démantelée, la Russie retire son soutien économique à Cuba et l'île est à l'agonie. Le tourisme dynamisé pour soutenir l'économie cubaine permettra pourtant aux visiteurs de mieux connaître la musique cubaine et, face à l'engouement européen, les professionnels du spectacle feront
jouer de nombreux groupes en Europe. « IRAKERE » peut survivre grâce à son talent et à cette situation. |
Si "Chucho" décide de se passer de flûtiste il engage Adalberto LARA comme second trompettiste. La sœur de "Chucho", Mayra Caridad VALDÉS entre dans « IRAKERE » comme chanteuse et pallie ainsi à la sortie en 1994 de Oscar VALDÉS qui part former son propre groupe. A plusieurs reprises entre 1994 et 1996 « CHANGUITO » joue ponctuellement avec la formation. Le groupe cubain est au Venezuela en 1994, ainsi qu'au Canada pour le Festival de Banff , au Carnaval de Barranquilla avec deux présentations historiques au Rincón Latino et au Club Campestre et à Los Ángeles en 1995, année qui voit de nouveau « IRAKERE » en Colombie d'où la formation ramène le fameux trophée Congo de Oro . |
Tous ces départs successifs auxquels s'ajoutent celui de « Angá » DÍAZ et de nouveau celui de AVEROFF annoncent une nouvelle période durant laquelle « IRAKERE », sans nécessairement perdre de ses qualités va voir tourner fréquemment ses effectifs et "Chucho" VALDÉS redoubler d'efforts dans ses tâches de gestionnaire de l'orchestre. |
« IRAKERE » poursuit ses tournées et obtient un immense succès en Angleterre, en Espagne, en 1996; joue à Cuba avec le brésilien Ivan Lins avec un enregistrement live à la clé et part pour le Brésil où est enregistré « Boleros Inigualables ». Autour de "Chucho" reste la vieille garde, Carlos EMILIO, Carlos Del PUERTO, Enrique PLÁ et les nouveaux sont : les trompettistes Mario FERNÁNDEZ et Basilio MÁRQUEZ ; les saxophonistes Alfredo THOMPSON et César LÓPEZ ; les percussionnistes José Miguel MELÉNDEZ et Andrés MIRANDA . Mayra est définitivement la voix de la formation cubaine qui va l'année suivante jouer à Puerto Rico, en Europe au North Sea Festival , à Montreux et de nouveau au Ronnie Scott «IRAKERE » enregistre en 1997 deux disques importants dans deux configurations différentes. «Yemaya » compte sur la participation des musiciens ci-dessus mais les rotations se poursuivent. "Chucho"offre à Carlos EMILIO un partenaire en introduisant une seconde guitare, celle de Jorge Luis « Chicoy» VALDÉS . ..... Et le disque « Cantata a Babalú Ayé », pour lequel le groupe de Lázaro ROS est également invité pour un thème, rassemble Maikel ANTE et José Miguel MELÉNDEZ pour les parties vocales, ce dernier également percusionniste avec Adel GONZÁLEZ ; Carlos EMILIO et Jorge Luis « Chicoy » VALDÉS qui tiennent les guitares. Deux nouveaux et jeunes saxophonistes Román FILIÚ et Irving ACAO apparaissent dans la formation. Basilio MÁRQUEZ est assisté d'une autre promesse cubaine: Julio PADRÓN. Jorge REYES a remplacé Del PUERTO et PLÁ reste le batteur. |
Ces deux disques marquent pour « IRAKERE » une nouvelle étape au cours de laquelle le groupe ne sera plus la préoccupation majeure de "Chucho"VALDÉS qui renoue avec une carrière personnelle et avec son cuarteto. Les tournées restent fréquentes et les Cubains jouent en Espagne en 1998; aux Etats Unis, régulièrement, avec une belle présentation en 1999 au Wisconsin Theater mais ils voient leur concert annulé à Miami. « IRAKERE » se présente en France, notamment au Festival de Jazz de Marciac en 1999. Le percussionniste Yaroldy ABREU rejoint les musiciens de "Chucho" et les claviers sont bientôt tenus par PÉREZ GONZÁLEZ . |
L'année 2001 est l'occasion pour « IRAKERE » de jouer au JazzFest de Puerto Rico, à Boston , Palm Beach... Irakere fête ses trente ans. « IRAKERE » participe également lors d'une tournée en Europe à la célébration du 45° anniversaire du Ronnie Scott et joue au Festival de San Sebastián. Le Japon réserve un accueil exceptionnel aux musiciens et de véritables ovations saluent les solos de César LÓPEZ et Mayra Caridad . Pour le Festival Jazz Plaza 2004 le saxophoniste Orlando SÁNCHEZ intègre la formation. Si depuis que "Chucho" VALDÉS a renoué avec une activité pianiste personnelle plus intense et avec son cuarteto, la vie de « IRAKERE » s'est sensiblement ralentie, le groupe continue d'enregistrer auprès du public un succès considérable. On l'entend pourtant toujours à travers le monde. VALDÉS et le groupe sont en France en 2005 et y retrouvent sur scène, le temps d'un thème -« Conga carnaval »-, un ancien membre « Angá » DÍAZ. |
Alors que l'on annonce la participation du groupe sur la scène du Jazz Plaza 2009 pour son 36° anniversaire, c'est avec une nouvelle formation "AKOKÁN" que VALDÉS se présente. |
Ponctuellement pour des occasions spécifiques "Chucho" VALDÉS rassemble sous le nom de « IRAKERE » un ensemble de musiciens avec lesquels il se présente sur diverses scènes ou dans des festivals. |
Ils débutent la tournée 2015 à Jazz à Vienne en juillet. Dix neuf dates ponctuent les deux mois d’été. Berlin, Lugano, Saint Petersbourg, Madrid, Malte, le Ronnie Scott’s -avec une interprétation de « Take Five » sur laquelle s’illustre BRINGUEZ - précèdent un retour en France avec de nouvelles prestations et comme point d’orgue le Festival Jazz in Marciac où la formation enregistre en live l’hommage à « IRAKERE ». VALDÉS s’envole ensuite vers les Etats Unis avec les dix membres du Tribute to Irakere. C’est d’abord en Californie qu’ils se présentent au Walt Disney Concert Hall. Le concert débute par « Juana 1600 » puis suivent « Danza Ñañiga », « Estela va a estallar », « Caridad Amaro », « Afro Comanche »… Le périple se poursuit à Tucson, Arizona. Ces deux Etats reçoivent les concerts en plusieurs lieux dont le San Francisco Jazz Center. Le Tribute se poursuit à Chicago, New York, où Roberta Gambarini vient chanter « Que te pedí » au milieu du répertoire habituel où figurent « Misa Negra », « Lorena’s Tango »…, Boston, Phoenix… franchit les eaux caribéennes pour se présenter à Puerto Rico. |
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La tournée se poursuit l'année suivante avec des étapes en France à Biarritz, Cully, Villefranche, Montreuil, Rouen, en Suisse à Bale en mai en Espagne à Bilbao, Zaragoza, Malaga au Teatro Cervantés... à Londres au Ronnie Scott, de nouveau en France à Boulogne puis à La Villette en septembre. |
© Patrick Dalmace
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* “ Para Bailar Son los Irakere. L.H. 1980, Irakere Vol. V , Egrem 149. In * “ Havana Jam I & II”, L.H. 1979, Columbia 36053 et 36180.
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